Les consequences biographiques de l eng

Séminaire doctoral du Centre Emile Durkheim 05/04/2015
Paul Cormier

Les conséquences biographiques de l’engagement en contexte répressif. Militer au sein la gauche
radicale en Turquie: 1974-2014.
La soudaineté et l’intensité du mouvement qui s’est développé autour du parc Gezi, place
Taksim à Istanbul, en mai et juin 2013 sont venues rappeler avec force que bouillonnaient en Turquie
d’intenses mobilisations en même temps qu’elles ont rendu éclatante la politique répressive et
autoritaire de l’Etat turc. Cette mobilisation et cette répression s’inscrivent aussi dans une histoire
longue, celle d’une République à la trajectoire mouvementée. C’est à l’articulation sur le long terme de
ces deux dynamiques entremêlées que s’intéresse cette recherche. Le cas d’étude choisi, largement
méconnu dans la littérature spécialisée sur la Turquie et sur les mouvements révolutionnaires en
général, est basé sur les militants de la gauche révolutionnaire turque des années 1970, période
d’intense mobilisation politique et de forte conflictualité sociale. Ceux-ci ont en effet été confrontés au
coup d’Etat et au régime militaire de 1980-83 qui a radicalement transformé le régime et l’exercice de
la répression qui s’exerçait alors, redessinant en profondeur, et jusqu’à aujourd’hui, les possibilités de
contestation et de mobilisation. Il s’agit donc d’étudier par le bas, c'est-à-dire à travers les carrières
militantes de gauche des années 1970 à aujourd’hui, les conséquences biographiques de l’engagement
et de la répression en contexte autoritaire.
On est en effet frappé, à la lecture de la littérature en sciences sociales sur ces questions, de
constater que ces deux perspectives sont le plus souvent étudiées de manière séparée (Combes &

Fillieule, 2011). Cherchant à les réunir, j’ai bâti la problématique de la recherche sur la base d’un
certain nombre d’interrogations : quelles sont les dynamiques à l’œuvre dans un engagement
révolutionnaire en régime autoritaire ? Quels sont ses effets sur les mouvements sociaux
contestataires, en l’occurrence révolutionnaires, et sur les parcours individuels ? Quelles réactions
opposent les mouvements contestataires à sa mise en œuvre ? Répondre à ces interrogations implique
d’adopter une démarche tenant compte des interrelations entre une pluralité d’échelles et d’espaces
sociaux afin de mieux comprendre les liens entre trajectoires individuelles et situations politiques de
crise et de renversement des pouvoirs par un coup d’Etat militaire. En se focalisant sur les cas
stambouliote et ankariote, l’étude de ces trajectoires d’engagement permet de rendre compte, en creux,
de l’évolution politique de la Turquie dans la seconde moitié du XXe siècle.
1. État actuel de la recherche : science politique, sociologie et histoire
L’interrogation sur les raisons (dans les deux sens du terme) de la domination traverse toute la
philosophie politique. Du questionnement d’Etienne de la Boétie sur les origines de la servitude
volontaire en passant par les écrits Max Weber et jusqu’aux travaux de Michel Foucault (1975) sur la
société disciplinaire, la problématique de la domination/révolte, qui s’est illustrée dans la philosophie
politique, a également été centrale dans les réflexions des politologues. Cette recherche se situe à
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l’intersection de deux interrogations et de deux insatisfactions à l’égard de la littérature politologique,
sociologique et historique. La première concerne la manière d’analyser de manière conjointe les
mobilisations révolutionnaires dans des contextes autoritaires et les effets de la répression sur ces
mêmes mouvements et les trajectoires des acteurs ayant investis ces contestations. Pour tenter de lier
ensemble ces questionnements, je mobilise plusieurs types de littératures : la sociologie des
mobilisations et de l’engagement qui permet d’étudier la manière dont naissent et agissent les
collectifs, mais aussi les déterminants et les caractéristiques des carrières militantes (Fillieule,
Agrikoliansky et Sommier, 2010) ; la sociologie des régimes autoritaires s’intéressant aux modalités
particulières de l’activité protestataire et révolutionnaire contrainte par les répertoires répressifs des
régimes autoritaires (Goodwin, 2001 ; Camau et Massardier, 2009) ; la sociologie des crises politiques
attentive aux dynamiques propres aux conjonctures critiques et à leurs propriétés spécifiques (Dobry,
2009). La seconde, de manière assez spécifique, touche à la littérature politologique, sociologique et
historique sur la Turquie.
D’un point de vue théorique, deux éléments centraux sont au cœur de ma réflexion. Le premier
concerne l’analyse des conséquences biographiques de l’engagement (McAdam, 1989) qui restent
encore insuffisamment explorées. Il s’agit, dans une perspective processuelle et configurationnelle
(Fillieule, 2012), de ne pas réduire le militantisme et ses effets à l’activité menée au sein de
l’organisation investie. On cherche alors à saisir, d’une part, les dynamiques à l’œuvre dans
l’engagement militant tout en les liant avec les travaux sur la radicalisation politique (Tackett, 1997 ;
Collovald & Gaïti, 2006). D’autre part, il s’agit d’être attentif à ce que le militantisme fait aux

« carrières militantes » (Fillieule, 2001) selon différentes temporalités (à court, moyen et long terme)
et à la manière dont il affecte et est affecté en retour par les autres « sphères de vie » (Passy, 2005)
dans lesquels les militants sont inscrits (familiale, professionnelle, privée…). La sociologie des
mouvements sociaux a eu tendance à homogénéiser dans le temps et à trop rapidement surévaluer, par
un effet grossissant lié à la focale disciplinaire, la centralité du militantisme dans la vie des acteurs
engagés. Or, ceux-ci sont insérés dans une pluralité d’espaces sociaux exerçant les uns sur les autres
des effets réciproques variables dans le temps et l’espace (Lahire, 2001, 2006, 2012). Il s’agit donc de
questionner et de réévaluer, dans un cas précis et par une analyse sur le long terme, le coût1 du
militantisme radical en régime autoritaire sur les différentes sphères de vie en tenant compte de la
réciproque. Un tel choix implique de tenir compte des discontinuités à l’œuvre dans les carrières
militantes, c'est-à-dire des engagements/désengagements (Fillieule, 2005 ; Leclercq, 2008 ; Sommier,
2013) concomitants ou successifs, des dynamiques de reconversion (Tissot et al., 2005) et des
circulations militantes, en partie contraints par l’évolution du champ politique et des espaces militants
1

Sans tomber dans les apories de la théorie du choix rationnel, précisons simplement que les individus anticipent
le coût de participer dans la politique contestataire, à l’aune de différents éléments (expériences personnelles de
répression, socialisation familiale, image du/de la militant-e véhiculée par la culture populaire, etc.). Mais ils
peuvent également subir ces coûts de l’engagement en termes d’impact de la répression sur leur vie personnelle,
professionnelle et politique.

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en régime autoritaire. On est donc conduit, dans une perspective synchronique, à ne pas s’en tenir à
une simple analyse de l’activité militante mais à essayer d’en voir dialectiquement les effets et échos
sur les autres espaces sociaux investis par les acteurs. Diachroniquement, on cherche à observer les
conséquences biographiques de l’engagement au-delà de d’une période d’activité militante dans une
organisation déterminée en constatant les recompositions des carrières militantes dans leurs
interactions avec leurs environnements méso- (espace militant) et macrosociologique (évolution du
contexte politique).
Le second point touche à la prise en compte des modalités et des conséquences de la
répression politique sur les espaces, organisations et trajectoires militants, en particulier en ce qui
concerne les régimes autoritaires (Vairel, 2008 ; Geoffray, 2011). Si de nombreux travaux se sont
attachés à analyser le fonctionnement de la répression en régime totalitaire (Werth, 2007, 2009) et en
régime démocratique (Bruneteaux, 1995 ; Fillieule & Della Porta, 2006), on connait finalement assez
mal le fonctionnement de celle-ci dans les régimes autoritaires (Hibou, 2006 ; Camau & Massardier,
2009). Cela tient en partie à la difficulté qu’il y a à les définir (Hermet, 1985 ; Linz, 2006). Par
ailleurs, la littérature sur la répression politique a eu jusqu’ici tendance, soit à isoler le moment
répressif pour analyser ses effets sur les mobilisations de manière générale (Opp & Roehl, 1990) ou en

situation (Davenport et al., 2005 ; Fillieule & Della Porta, 2006), soit à l’analyser à travers les
dispositifs étatiques de sa mise en œuvre (Bruneteaux, 1995). Elle a rarement été observée dans une
perspective sociohistorique attentive à l’exercice de ses modalités et son intensité dans le temps en
fonction des priorités et possibilités sécuritaires et politiques des gouvernements successifs
(Codaccioni, 2013). Il s’agit donc ici de lier la littérature sur la répression politique à la sociologie des
mouvements sociaux (Combes & Fillieule, 2011). Le but est de parvenir à articuler dans le temps et
dans l’espace (cf. infra 1. 4) les dynamiques et les conséquences de l’engagement révolutionnaire – au
niveau individuel comme collectif – avec celles des modalités d’exercice de la répression en régime
autoritaire. Ainsi, une des spécificités de la Turquie de cette période est la survenue en 1971 et 1980
de deux coups d’Etat militaires successifs2 qui, quoiqu’ayant eu des effets politique et sociaux
différents, vont brusquement radicaliser la répression politique et provoquer une profonde
recomposition des espaces militants protestataires tout en mettant un terme aux crises politiques3.
Cette situation a ainsi conduit à parler pour la Turquie « d’Etat prétorien » (Insel, 2008). Comment
analyser ces durcissements du régime par rapport aux situations antérieures et ultérieures de pouvoir
civil ? Quel impact, à court et long terme, ces coups d’Etat ont-ils eu sur les organisations
révolutionnaires et sur les trajectoires biographiques des militants qui les composaient alors ? On voit
2

Le coup d’Etat de 1971 ne suspend pas les autorités mais opère une mise sous tutelle des institutions jusqu’en
1974. En septembre 1980, les militaires captent totalement le pouvoir et le conservent jusqu’en décembre 1983.

3
Notre proposition d’analyser le militantisme révolutionnaire par une approche processuelle est transposable, à
une autre échelle, aux coups d’Etat militaires. Ceux-ci sont également le fruit de dynamiques entremêlées et
complexes. Il ne s’agit pas ici d’homogénéiser l’ensemble des institutions de sécurité et de faire du coup d’Etat
un évènement hors-sol.
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là tout le profit qu’il y a à relier dynamiques protestataires, sociologie des crises politiques et
sociologie de la répression politique en régime autoritaire, ces dynamiques ne pouvant être comprises
indépendamment les unes des autres.
Au regard de la littérature en études turques, la décennie 1970, décennie de crise politique,
d’intense politisation et de conflictualité sociale et politique meurtrière entre gauche et droite4 sur fond
de crise économique qui débute et s’achève par des coups d’Etat militaire (1971 et 1980), reste mal
connue (Gourisse, 2010) et bien souvent résumée et autonomisée du reste de l’histoire de la
République turque par la dénomination de « décennie du chaos » (Bozarlsan, 1997), précédant la
libéralisation du pays à partir de 1983. Dès lors, un des objectifs de cette recherche est de réintégrer
cette période dans une temporalité plus longue et d’approcher de plus près sa réalité sociopolitique en
tentant de sortir de son brossage macrohistorique - soulignant la violence politique (Bozarslan, 1999)

et l’instabilité gouvernementale - et téléologique (le coup d’Etat comme conséquence inéluctable).
Cette période offre un cas d’étude passionnant pour un renouvellement historiographique, à condition
d’y introduire les jeux d’échelles5 nécessaires à sa bonne intelligibilité, et l’apport d’éclaircissements
sur de nombreuses questions largement débattues dans les sciences sociales.
Enfin, la quasi-totalité des travaux sur la Turquie, et sur cette période en particulier, souffre
d’un « istanboulo-centrisme » évident. Il ne s’agit pas de tomber dans le biais inverse et mettant de
côté la littérature sur cette ville mais de s’y adosser pour décaler le regard et initier une démarche
comparative, en l’occurrence avec Ankara. S’intéresser aux acteurs « dominés » et « réprimés », c'està-dire exclus de l’espace politique « institutionnalisé » en se focalisant sur Istanbul conduit à
(re)produire le reflet provenant d’un miroir déformant. En effet, quand bien même on travaille sur une
fraction « dominée » de l’espace politique, il s’agit de la fraction dominée de la ville dominante. Ce
type d’analyse reproduit alors l’asymétrie de type Capitale/Province6 qui voudrait que les « vrais
enjeux » se situent dans la capitale et que ce qui se déroule en dehors de celle-ci ne constitue qu’une
image miniature des enjeux « nationaux ». Deuxièmement, cette myopie à l’égard de tout ce qui se
déroule à l’arrière plan d’un pays n’a pas pour unique conséquence la méconnaissance de ces espaces
« périphériques ». Tout comme le « jeu d’échelle » micro, meso et macro permet une meilleure
compréhension de ces différents niveaux d’analyse et de l’objet en général, il est nécessaire d’étudier
certains enjeux périphériques pour mieux comprendre ce qui se passe dans la capitale.

4


Entre 1975 et 1980, on compte plus de 5 000 morts dans les affrontements entre groupes de gauche et droite
radicaux (Gourisse, 2010).
5
Les réflexions autour de la variation des échelles viennent du courant de la microstoria (cf. Revel, 1996).
6
La distinction capitale/province prend, dans le cas turc, un sens tout à fait particulier dans la mesure où Ankara
est la capitale politique du pays depuis la fondation de la République en 1923, concentrant l’essentiel des
administrations et institutions politiques, tandis qu’Istanbul reste la capitale économique et culturelle en même
temps que la capitale « historique » du pays.
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2. État d’avancement de mes propres travaux
Mon travail autour de la gauche radicale turque a débuté lors de mon année Erasmus à Istanbul
en 2008-2009. J’y ai suivi un séminaire de recherche dispensé par les chercheurs de l’Institut Français
d’Etudes Anatoliennes et qui se basait sur la réalisation d’une brève enquête de terrain adossé à des
cours de méthodologie. J’ai choisi de travailler sur une association de militants de la gauche des
années 1970 s’étant regroupés pour demander réparation quant aux violences subies dans la suite du
coup d’Etat militaire de 1980 ainsi que le jugement des généraux putschistes et des tortionnaires ayant

sévi dans les prisons turques d’alors. J’avais orienté cette recherche autour de deux thématiques
principales : le questionnement autour des notions de « génération » (Crête & Favre, 1989) et de
« mobilisation victimaire » (Lefranc & Mathieu, 2009). J’ai repris ce premier travail de terrain pour
mon mémoire de Master 2 (sous la direction de Myriam Aït-Aoudia et Antoine Roger), orienté sur les
conséquences biographiques de l’engagement et de la répression face au coup d’Etat militaire de 1980.
J’ai, depuis le début de la thèse, effectué trois terrains de recherche en Turquie : le premier de
la mi-juillet à la fin novembre 2013, un second au printemps 2014 (mai-juin) et le troisième pendant
tout le mois de novembre 2014. Un dernier sera effectué au cours du mois d’avril 2015. Le premier
séjour, sur Istanbul et Ankara, m’a permis de me familiariser avec le terrain, de prendre des contacts et
de réaliser les premiers entretiens tout en accumulant de nombreuses données (archives, documents,
photographies, livres, observations ethnographiques). Les deux terrains suivants ont été centrés sur
Ankara où j’ai réalisé tous les entretiens prévus et poursuivi l’accumulation de données tout en
réalisant des observations ethnographiques plus poussées lors d’actions militantes auxquelles j’ai été
convié. Ces terrains successifs, qui ne furent pas toujours évidents à conduire, ont donné lieu à deux
textes réflexifs sur le rapport entretenu entre enquêteur et enquêtés.
J’ai envisagé, sur le terrain, d’élargir mon terrain d’enquête, à deux militantismes
concomitants et conflictuels vis-à-vis de la gauche radicale (la droite radicale et l’islam politique) afin
de comparer les trajectoires biographiques et organisationnelles de ces trois orientations politiques
depuis les années 1970 et ainsi de pouvoir observer les différences et ressemblances dans les
conséquences biographiques de l’engagement et de la répression au sein de ces trois militantismes

« radicaux » ayant émergé de manière quasi concomitante. Mais la difficulté de mener ces trois
terrains de front m’a fait renoncé et me recentrer sur le projet de départ.
3. Plan de recherche détail – Objectifs
1 – Premièrement, il s’agit de contribuer à la sociologie du militantisme. En s’intéressant aux
« carrières militantes », on peut rendre compte de l’inscription de l’activité militante dans la trajectoire
personnelle tout en reliant cette activité aux autres sphères de vie, et ainsi restituer ces carrières dans
toute leur complexité (Jasper, 1999 ; Fillieule, 2001). Il s’agit non seulement de s’intéresser aux effets
synchroniques du militantisme mais également à ses effets diachroniques, c'est-à-dire aux
conséquences biographiques de l’engagement (McAdam, 1989), notamment face aux changements
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brutaux dans les configurations politiques locales et nationales (coup d’Etat). Par ailleurs, l’intérêt
porté aux individus permet de rendre compte d’une manière plus convaincante des dynamiques de
radicalisation qui peuvent pousser tel ou tel acteur à faire usage de la violence politique tout en
s’éloignant des visions psychologisantes ou « culturalisantes » de ces comportements (Sommier, 1998,
2013 ; Collovald & Gaïti, 2006 ; Fillieule, 2012).
2 – Deuxièmement, et parallèlement à l’étude des trajectoires individuelles, cette étude vise à
conduire une sociologie fine des milieux militants investis par les acteurs et objets de manière plus ou

moins récurrente de la répression d’Etat. Cela implique la reconstitution de ces espaces dans leur
diversité organisationnelle et militante tout en y incluant deux variables souvent négligée dans la
littérature : la dimension diachronique, à savoir les évolutions et reconfigurations successives de ces
espaces dans le temps, et la dimension spatiale des mobilisations (Sewell, 2001) par une comparaison
systématique entre deux villes, inégalement étudiées jusqu’ici, Istanbul et Ankara.
3 – Troisièmement, en s’interrogeant sur les carrières militantes, il devient possible, en creux,
de contribuer à la sociologie des régimes autoritaires. La description de la manière dont se mettent en
place les activités militantes contestataires permet simultanément l’analyse des tactiques et modes
d’action que les différentes autorités et régimes (civil ou militaire) mettent en œuvre pour les réprimer
(Goodwin, 2001 ; Davenport et al., 2005).
4 – Quatrièmement, les enjeux méthodologiques du projet sont à souligner. Il s’agit en effet de
discuter de la nature des matériaux exploitables sur un terrain pauvre en archives et donc de mener une
réflexion sur l’usage et le statut des sources orales dans l’enquête (cf. infra). Corollairement, il semble
nécessaire de s’interroger sur la notion de mémoire individuelle et collective (Halbwachs, 1994, 1997 ;
Lavabre, 1994) tant d’un point de vue méthodologique (quelle statut pour quelle scientificité ? Quelles
méthodes pour objectiver le souvenir ?) que d’un point de vue analytique (reconstruction de la
mémoire individuelle post-répression violente, enjeux mémoriels des coups d’Etat…) (Lefranc, 2002).
4. Problématique et hypothèses
L’ensemble de ces questionnements sur la littérature théorique et spécialisée m’a
progressivement amené à formuler la problématique qui constitue le cœur de cette recherche : Quels
sont les conséquences biographiques de l’engagement révolutionnaire et de la répression
politique en régime autoritaire ? J’ai progressivement élaboré, par des allers et retours entre les
données empiriques obtenues sur le terrain et mes lectures successives, une série d’hypothèses visant à
répondre à cette question centrale.
Les acteurs qui s’engagent dans des organisations révolutionnaires dans les années 1970 en
Turquie proviennent d’univers sociaux variés dont la seule analyse ne permet pas d’expliquer les
conditions et les dynamiques d’engagement. Leur politisation et leur radicalisation s’opèrent plutôt par
une conjonction entre leurs propriétés sociales et la contingence des configurations et des évènements
sociaux et politiques rencontrés (Hypothèse 1).
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Dans cette perspective, initier une démarche comparative entre deux villes importantes mais
aux caractéristiques très distinctes permet d’approcher avec davantage de finesse les profils militants
présents dans ces deux villes et ainsi d’expliquer la structuration et l’évolution différenciée dans le
temps d’espaces militants locaux (au sein de la gauche et entre gauche et droite) avant comme après le
coup d’Etat (Hypothèse 2).
Par ailleurs, faire l’hypothèse d’une structuration locale différenciée des espaces militants
conduit, par analogie à supposer des modalités et des temporalités de répression également
particulières à chaque espace. Parallèlement, comme le montrent les travaux sur les rapports entre
répression et mobilisation, la transformation des pratiques répressives suggère l’existence d’un lien
fort entre les répertoires répressifs et les modalités de l’action protestataire (Hypothèse 3).
En lien étroit avec ces deux précédentes hypothèses, les données de terrain montrent que,
aujourd’hui comme dans les années 1970, la dimension spatiale de la contestation devait être prise en
compte de manière sérieuse (Sewell, 2001 ; Auyero, 2005 ; Hmed 2008). Le contrôle de l’espace
s’avère être une dimension essentielle de l’action révolutionnaire qui le constitue comme un objectif,
dans son opposition à l’extrême droite d’une part et aux forces de sécurité de l’autre. Au-delà de
l’affirmation de soi et de l’exclusion des adversaires, l’espace occupé (quartier, rue, cité
universitaire…) devient un lieu de concentration des ressources de l’organisation7 (Hypothèse 4). La
concurrence pour l’espace devient alors une des dynamiques de la confrontation avec les forces de
sécurité qui ont pour ambition de réintégrer ces territoires dans leur espace de gouvernement.
Il est bien évident que les hypothèses 2, 3 et 4, ici présentées de manière autonome pour la
clarté du propos, entretiennent des liens très étroits entre elles. Mais elles ont également des effets très
nets sur la structuration des dispositions des militants qui se trouvent investis dans les groupes
révolutionnaires. Elles sculptent ainsi leurs manières d’être, de sentir et de voir, leur rapport à
l’organisation, à la répression et aux modalités de l’action protestataire qu’il s’agira d’expliciter dans
l’écriture de la thèse.
Il semble également très important, en ce qui concerne les conditions d’entrée, de maintien et
de recomposition de l’engagement avant et après le coup d’Etat de tenir compte des réseaux de
sociabilité militante et de leur structure (Gould, 1995). C’est en effet par leur biais que, y compris dans
des contextes très répressifs, les organisations interdites et/ou « mises en sommeil » (Taylor, 2005)
peuvent se reconstituer lorsque les conditions le permettent. Ils semblent, au regard de l’enquête de
terrain, s’être avérés cruciaux tant dans les trajectoires individuelles (recherche d’emploi) que dans la
reconstitution des organisations et partis révolutionnaires dans la Turquie des années 1990 (Hypothèse
5).
Il en découle une hypothèse centrale de la recherche qui consiste à postuler, à une échelle
individuelle, que les conséquences biographiques de la répression, notamment à l’issue du coup d’Etat
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Nous entendons ici « ressource » au sens que lui donne le courant dit de la mobilisation des ressources
(McCarthy, Zald & Mayer, 1977.
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de 19808, ne sont pas identiques pour tous les militants engagés (Hypothèse 6). En effet, les
opportunités pour faire face à la répression à court, moyen et long terme ne sont pas également
réparties entre les acteurs. Si l’on prend l’exemple de l’exil, on peut supposer que seuls les militants
possédant les capitaux nécessaires (financiers et sociaux) susceptibles de leur en ouvrir l’accès
pourront trouver refuge à l’étranger et se trouver pris en charge par des réseaux militants sur place. De
même, à l’issue du régime militaire et des périodes de détention ou d’exil des militants, les possibilités
de continuité ou de reconversion familiale, professionnelle et politique varient suivant les capitaux
possédés par les acteurs et selon les configurations militantes locales. Les capitaux vont ainsi s’avérer
cruciaux et participer à la détermination des possibilités de maintien de l’engagement, de reconversion
professionnelle et politique, d’exit ou de bifurcation (Grossetti et al., 2010) en fonction des espaces
sociaux9 dans lesquels ils seront investis.
Enfin, il faut parvenir à penser le lien entre mémoire (individuelle et collective) et
conséquences de l’engagement (Hypothèse 7). La chape de plomb qui pèse sur la mémoire des
mobilisations politiques des années 1970 depuis le coup d’Etat et ses effets symboliques sont tels que
de nombreux militants ont choisi de garder le silence sur leurs expériences passées, par peur
d’alimenter le regard « démonisant » porté sur le militantisme de l’époque, empêchant par là les
politiques de la mémoire et de lutte contre l’impunité des putschistes de voir le jour. Les luttes
demandant la reconnaissance de violations des droits de l’Homme commises sous le régime militaire
ne rencontrent qu’un faible écho en Turquie. Il s’agit là d’une autre conséquence de l’engagement
révolutionnaire, à savoir la mise au ban des individus mobilisés et de leur mémoire individuelle et
collective qui se trouve aujourd’hui tue.
Je propose donc, à travers le cas de la gauche révolutionnaire turque des années 1970 à nos
jours, d’articuler dans le temps et par une pluralité d’échelles d’analyse 1) les conséquences
biographiques de l’engagement et de la répression sur les militants révolutionnaires 2) la sociohistoire
des conditions d’existence d’un espace militant de gauche dans un régime autoritaire ainsi 3) qu’une
réflexion sur les conditions et les modalités d’exercice de la répression politique dans ce même régime
autoritaire renforcé par un coup d’Etat militaire. Ce projet donne en quelque sorte à voir en creux, dans
une période de salutaire renouvellement de la littérature sur les révolutions politiques dans la foulée
des printemps arabes (Bennani-Chraïbi & Fillieule, 2012), les conditions de l’échec d’un mouvement
révolutionnaire (Piven & Cloward, 1978 ; Goodwin, 2001) face à la fermeture d’un système politique
et à sa restructuration autoritaire.

8

A titre indicatif la répression qui suit le coup d’Etat entraine 50 exécutions capitales et plus de 400
« disparitions », 650 000 arrestations et plus d’un million de personnes fichées, des milliers d’exilés, de
fonctionnaires révoqués et de citoyens déchus de leur citoyenneté.
9
Nous reprenons ici la notion de « capital » au sens où l’entend Pierre Bourdieu (1979, 1980) sans l’adosser
nécessairement au concept de « champ » (Bourdieu, 1984) dont la définition précise ne correspond pas à tous les
espaces sociaux dont il s’agit ici.
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5. Importance du projet
Cette recherche constitue un des premiers travaux consacrés à l’histoire de la gauche turque
considérée, non pas comme un ensemble homogène ou à travers une perspective organisationnelle,
mais tentant, à travers des trajectoires individuelles remises en contexte, d’en affiner la connaissance
historique, sociale et politique. Par ailleurs, ce projet est un des premiers à sortir de l’ « istanboulocentrisme » propre aux recherches sur la Turquie contemporaine10. Il cherche à questionner, par une
approche comparative entre Istanbul et Ankara sur quatre décennies, la diversité des dynamiques des
mouvements contestataires et à affiner la connaissance des espaces et des réseaux militants en Turquie
à travers son histoire récente, politiquement mouvementée.
Parallèlement à cet intérêt empirique, ce travail contribue, par une enquête de terrain
approfondie, à affiner la sociologie des mouvements sociaux en s’intéressant au militantisme, non pas
seulement de manière synchronique, mais de manière diachronique en se focalisant sur les
conséquences biographiques de l’engagement et de la répression à court, moyen et long terme et en
tenant compte de l’ensemble des « sphères de vie » (Passy, 2005) dans lesquelles les acteurs sont
inscrits. On tient à observer ces carrières militantes et leurs recompositions en lien avec les divers
contextes dans lesquelles elles s’inscrivent, donnant ainsi à voir les recompositions des organisations
politiques ainsi que du contexte plus macrosociologique qui conditionne les pratiques militantes ainsi
que les risques, plus ou moins élevés, de subir la répression. A l’heure où la littérature sur les « arts de
la résistance » à l’Etat (Scott, 2009, 2013) se développe fortement dans le monde académique, il
semble nécessaire de poursuivre, dans la recherche francophone, des enquêtes sociologiques fouillées
sur les modalités d’exercice de la répression dans les différents régimes politiques ainsi que sur les
profondes ruptures que constituent les coups d’Etat (Boutin & Rouvillois, 2007). On ambitionne ainsi,
à l’image du cas chilien (Gaudichaud, 2013), à rechercher par le bas la voix des acteurs de la crise
politique des années 1970, occultée par la répression subséquente.
Cette enquête vise donc à produire d’abord, et au-delà du seul cas turc, des données permettant
de la comparer avec d’autres et, de ce fait, d’aller vers une cumulativité des recherches dans ce souschamp d’étude. Ensuite, ce travail permet de remettre en perspective les modalités d’exercice de
l’autoritarisme de l’Etat turc et de sa contestation sur une plus longue période à l’aune du raidissement
autoritaire que connait actuellement la Turquie sous la présidence de Recep Tayyip Erdoğan, et des
contestations dont il a fait l’objet ces dernières années11. Enfin, cette recherche compte ajouter une
pierre à l’édifice de la compréhension des mobilisations révolutionnaires qui ont émaillé les années
1960 et 1970 en de nombreux points du globe (Carel et al., 2013).
10

Cf. supra. Cette remarque est généralisable à nombre de recherches sur les pays dit du « Sud ». Cette
préoccupation à l’égard de ce que l’on pourrait appeler le « capitalo-centrisme », était au cœur de notre section
thématique co-organisée avec Youssef El Chazli, au mois de février 2015 lors du congrès des associations
francophones de science politique à l’Université de Lausanne (CoSPoF 2015)
11
Je pense bien sûr à la mobilisation autour du parc Gezi à Istanbul, rapidement diffusée à l’ensemble du pays,
au cours des mois de mai et juin 2013. La répression à l’égard des militants engagés dans de mouvement a fait 6
morts et se poursuit aujourd’hui à travers une succession de procès pour « terrorisme ».
9

Séminaire doctoral du Centre Emile Durkheim 05/04/2015
Paul Cormier
Si certain-e-s de mes enquêté-e-s ont accepté de s’entretenir avec moi quand bien même
ils/elles étaient encore susceptibles d’être arrêté-e-s pour leurs activités, c’est qu’ils et elles pensent
qu’un travail académique, restituant de manière détaillée et documentée la manière dont se sont
réellement déroulés les mobilisations révolutionnaires et leur répression depuis les années 1960-1970,
contribuera à conserver dans la mémoire historique un moment que le pouvoir turc essaie
énergiquement de cantonner au « chaos » (Bozarslan, 1997) sans esquisser de « politique du pardon »
(Lefranc, 2002).
6. Méthodes
Mon travail de thèse est construit sur différentes méthodes. Pour certaines, elles font partie de
méthodes largement utilisées et perfectionnées par la sociologie politique et historique (a, b). Par
ailleurs, dans le cadre de ma thèse, j’ai été amené à réaliser des observations en contexte (c) et à
défricher un corpus original de données pour le moment assez peu présent dans les travaux
sociologiques : l’analyse spatiale (e). Enfin, pour toujours ramener les différents types de données
récoltées, j’utilise plusieurs techniques pour contextualiser mon récit, notamment l’analyse de presse
(d).

a) Les sources biographiques (récits de vie, base prosopographique, mémoires militantes)
Les entretiens biographiques, ou récits de vie (Bertaux, 2010), sont ma principale source de
travail. Une trentaine a déjà été réalisée, d’une durée variant d’une heure à plus de quatre heures.
L’objectif des entretiens menés est double : d’une part, restituer les carrières militantes des enquêté-es, en les resituant notamment en lien avec les différentes sphères de vie (familiale, scolaire,
professionnelle), et d’autre part, récolter de la manière la plus détaillée possible le déroulement de
certains événements « marquants » pour les enquêté-e-s. Les entretiens servent aussi à rendre compte,
de manière plus réflexive, des catégorisations, justifications et rationalisations utilisées par les acteurs
pour expliquer leurs actions.
Ayant rencontré des difficultés à obtenir des entretiens du fait de nombreux refus12, j’ai élargi
mon panel d’entretiens via une base prosopographique constituée sur la base des entretiens et de
notices biographiques récoltées dans diverses publications sur la gauche turque. Celle-ci a été
constituée dans le but de résumer certaines caractéristiques des trajectoires biographiques (données
biographiques, scolaires, professionnelles, politiques) permettant de replacer et de comparer les
enquêtés interviewés dans un panel plus large.
Enfin, une des sources importantes dans l’analyse des conséquences biographiques de
l’engagement a été d’exploiter un matériau récent mais en plein développement en Turquie : les
mémoires militantes (Pudal, 1989 ; Pennetier, Pudal, 2002). Nombre de militants, principalement les
12

Ces refus seront questionnés dans l’évaluation méthodologique de la thèse.
10

Séminaire doctoral du Centre Emile Durkheim 05/04/2015
Paul Cormier
cadres d’organisation, publient leurs mémoires en fournissant force détails sur leur parcours mais
également sur le fonctionnement des organisations, leurs relations, les lieux investis et les modalités de
la répression. Ces textes fournissent, à condition de leur appliquer une réflexivité critique pour ne pas
endosser l’autojustification qui ne manque pas de poindre, des informations centrales pour l’analyse,
tant du point de vue biographique que du point de vue des motifs de l’action et des catégories
d’entendement de celle-ci. Une dizaine d’ouvrages ont été analysés.

b) Etude d’archives
L’analyse socio-historique du militantisme politique de la gauche radicale turque et de la
répression impliquait une recherche d’archives exploitables. La destruction des archives sous le régime
militaire (préventive ou punitive) et les difficultés d’accès aux archives militaires a rendu ma tâche de
chercheur ardue. Néanmoins, les quelques archives des militants et de leurs organisations ont été mises
à profit quand elles étaient disponibles. J’ai par ailleurs pu obtenir les publications militantes d’alors
ainsi que des copies d’affiches, de tracts et des photographies me permettant de compléter mon travail
de reconstitution des espaces et activités militants des années 1970-1980. Je me suis enfin servi de la
littérature grise disponible (publications des militaires, statistiques officielles, rapports parlementaires
et d’ONG) afin d’élargir au maximum mes sources et de parvenir à obtenir des recoupements
probants.

c) Observations ethnographiques de terrain
Le déroulement de l’enquête m’a conduit, en sus des entretiens menés avec les militant-e-s, à
les côtoyer dans leur vie quotidienne et dans les actions menées par les différents groupes politiques
dans lesquels ils sont aujourd’hui investis. J’ai ainsi pu assister à des manifestations, suivre la
préparation et la tenue d’exposition sur la mémoire de la répression en Turquie ou encore assister à des
audiences du procès des généraux putschistes de 1980 à Ankara. Ces observations ont
considérablement enrichi mon analyse basée sur les entretiens et les archives en ancrant davantage les
parcours dans le temps présent et me permettant de préciser davantage l’analyse des modes d’action
militants et les relations entre organisations politiques évoluant dans le même espace militant
(physique comme social).

d) Sources de presse
Pour être fidèle à une approche multi-niveaux des processus sociaux, naviguant entre le micro,
le méso et la macro, les sources biographiques et les études d’archives, servant à retracer les carrières
individuelles et les trajectoires des collectifs, sont systématiquement ramenées au contexte général
(économique, politique, social). Cela est possible grâce au dépouillement de la presse nationale (la
presse locale stambouliote ou ankariote étant quasi inexistante) sur la période 1974-1983.
11

Séminaire doctoral du Centre Emile Durkheim 05/04/2015
Paul Cormier

e) L’analyse spatiale (cartes et relevés)
Enfin, dans la suite de mon questionnement sur l’investissement et la concurrence autour de
l’espace géographique par les groupes politiques antagonistes dans la Turquie des années 1970 et de
mon étonnement face à son absence dans la littérature, j’ai tenté de reconstituer dans les deux villes
étudiées (Istanbul et Ankara), la répartition géographique des groupes. Cela m’a conduit à établir, en
collaboration avec les militants, des cartes des villes concernées mentionnant les espaces contrôlés
ainsi que leur organisation interne, les lieux politiques et symboliques clés en même temps que les
lieux militants (cafés, librairies, lycées et universités) fréquentés alors par les militants. J’ai enfin,
quand cela était possible, tenté de restituer les circulations militantes dans l’espace urbain et à l’échelle
nationale, qu’il s’agisse des trajets quotidiens ou ponctuels, des trajets offensifs en territoire adverse
ou des trajets de manifestations en tenant compte des lieux de rassemblement.

12

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