33
Réponse du Cameroun face à la crise
La croissance de l’économie camerounaise s’est établie à 2 pour cent en 2009, soit près de 1 point de moins que la moyenne des trois années précédentes. La crise financière a été principalement ressentie au
niveau des secteurs d’exportations chute des prix des produits tels que le bois, le pétrole, caoutchouc etc. à partir de la fin 2008, entrainant des pertes d’emplois massives dans ces secteurs. La reprise économique reste
fragile malgré le maintien des dépenses budgétaires prioritaires, et le soutien accordé aux secteurs sinistrés en 2009. Le lancement de grands projets d’investissements en 2010 pourraient aider à résorber le déficit
énergétique et infrastructurel du pays tout en contribuant à la création d’emplois aussi bien dans le secteur public que dans le secteur privé. Toutefois, ces progrès ne peuvent suffire à réduire la part de l’emploi
informel dans l’emploi total dans un contexte de forte pression démographique les jeunes entrants sur le marché du travail ont augmenté de 2,2 pour cent entre 2007 et 2008. Une croissance située entre 2,6 et 3,5
pour-cent selon les estimations, est prévue pour l’exercice 2010.
1. Aperçu de l’économie et du marché de l’emploi
Le Cameroun a vu son Produit Intérieur Brut s’établir à 3,3 pour cent de croissance moyenne sur les cinq années qui ont précédé la crise avec 3,3 pour cent de croissance du PIB enregistré en 2007. Cette
modeste performance est largement en deçà des prévisions de croissance escomptées par le Gouvernement, et également en deçà de la moyenne des pays au Sud du Sahara plus de 5 pour cent de croissance avant la
crise. Par ailleurs, la population croît presqu’aussi vite que le rythme de production le rythme d’accroissement de la population dépasse les 2 pour cent par an. Cependant avec l’élection de Cameroun au
point d’achèvement de l’initiative des Pays Pauvres Très Endettés PPTE en avril 2006, des progrès pourraient être perceptibles avec l’accroissement du niveau des investissements publics et la poursuite des
réformes structurelles, notamment dans les secteurs d’utilité publique.
8
A cela s’ajoute la bonne performance des secteurs pétrolier et agricole qui ont contribué à l’amélioration du solde de la balance courante avec des
excédents de l’ordre de F CFA 101 milliards 1,6 pour cent du PIB et F CFA 137 milliards 1,4 pour cent du PIB respectivement en 2006 et 2007, alors que la balance courante demeurait structurellement déficitaire
depuis 1995
9
. Les stratégies de réponses à la crise au Cameroun sont en partie antérieures à la crise et visaient
principalement les effets de la crise de 1992 qui a profondément affecté les structures économiques et sociales du pays. Les nouveaux efforts du Gouvernement pour maintenir cette fragile stabilité de l’économie
ont malencontreusement être ébranlés par la crise financière internationale survenue dans le dernier trimestre 2008. Cette situation a été marquée par un ralentissement de l’économie camerounaise déjà essoufflée,
matérialisée par une baisse du taux de croissance du PIB à 2,9 pour cent en 2008. Cette baisse aurait pu être plus grave, n’eut été les bonnes performances des secteurs pétrolier et agricole qui ont contribué
respectivement à 50 pour cent et 25 pour cent des revenus d’exportation en 2008, profitant ainsi de l’envolée des cours mondiaux des matières premières enregistrée pendant les mois précédant la crise. Il s’en est suivi
un déficit de la balance courante -2,3 pour cent du PIB en 2008 bien que le solde budgétaire global ait été excédentaire 2 pour cent du PIB en 2008.
8
Grâce à cette initiative, la dette publique est passée de FCFA 3652 milliards en 2005 à 882 milliards en 2008.
9
Après les excédents enregistrés en 1995 consécutif à la dévaluation du Franc CFA, la balance courante s’est détériorée emmenée par un déficit du solde commercial de F CFA 324,5 milliards en moyenne, sur la période 1996-2000. La balance
commerciale reste déficitaire dans une moindre mesure et affiche un solde moyen de F CFA 130 milliards jusqu’en 2005.
34
Le Cameroun n’a pas été épargné par les effets de la crise financière tout au long de l’année 2009, où le taux de croissance de son PIB s’est chiffré à seulement 2 pour cent. Cette performance est à mettre au
détriment de la baisse de la demande mondiale qui a induit une chute des cours des matières premières au cours de l’année, affectant ainsi le secteur des exportations camerounais où l’on a enregistré plus de 34 pour
cent de baisse des revenus.
Le secteur primaire qui représente plus de 20 pour cent du PIB a vu sa croissance s’altérer, s’établissant à seulement 1,9 pour cent en 2009 contre 5,3 pour cent en 2008. La production de caoutchouc en
plus de sa baisse 18,6 pour cent au 1er trimestre 2009 a vu ses cours chutés de 42,5 pour cent. Le secteur du bois on a enregistré une baisse de -31 pour cent au niveau des recettes d’exportations pour la même année.
Idem pour la banane où l’explosion des intrants à entrainer une baisse de 25,4 pour cent de la production. Le secteur secondaire qui contribue pour sa part à 25,9 pour cent du PIB, enregistrait de son côté une croissance
négative de -2,4 pour cent en 2009. Deux sous-secteurs expliquent cette mauvaise performance : l’industrie pétrolière, qui accumulait une baisse de sa production de l’ordre de 13,1 pour cent en 2009 par rapport à
2008, et les mauvaises performances de ALUCAM, qui étaient dues au déficit énergétique qui a affecté l’alimentation des usines d’aluminium. Seul le secteur tertiaire, avec sa participation de 46,2 pour cent à la
formation du PIB, a poursuivi son expansion enregistrant 4,9 pour cent de croissance en 2009 contre 2,6 pour cent en 2008 contribuant ainsi à 2,2 points à la croissance réelle.
Figure 1. Evolution du PIB réel en pour cent et de la Balance courante pourcentage du PIB
Source: BAD et du FMI 2010. estimations
Figure 2. Taux de croissance des secteurs d’activités entre 2007 et 2009
Source: Perspectives économiques en Afrique, OCDEBAD. -5.0
-4.0 -3.0
-2.0 -1.0
0.0 1.0
2.0
0.0 0.5
1.0 1.5
2.0 2.5
3.0 3.5
2006 2007
2008 2009
2010
PIB réel Balance du compte courant axe de droite
-3.0 0.0
3.0 6.0
Secteur Primaire Secteur Secondaire
Secteur tertiaire
2007 2008
2009
35
Cette tendance est principalement due au secteur des télécommunications qui a vu d’importants travaux s’effectués connexion à la fibre optique et le nombre des ses abonnés s’accroître de 37,1 pour cent
en 2009. Le taux d’inflation contre toute attente a eu une tendance baissière s’établissant 3,2 pour cent en 2009
contre 5,3 en 2008 grâce aux actions engagées par le Gouvernement en maintenant ses subventions pour l’approvisionnement des marchés en produits de première nécessité et en matériaux de construction. La
balance courante quant elle accroissait son déficit à 3,7 pour cent du PIB, en raison de la répercussion des effets de la crise sur le commerce extérieur et de la structure déficitaire de la balance des services et des
revenus. Cette situation a eu un effet d’entraînement si bien que le solde budgétaire global a également enregistré un déficit de l’ordre de 1,8 pour cent du PIB en 2009. La croissance prévue pour 2010 se situerait
entre 2,6 pour-cent selon le FMI et 3,5 pour-cent selon la Banque Centrale.
L’effet de la crise financière sur le marché de l’emploi : des emplois touchés dans le secteur primaire, crainte d’un accroissement de l’informalité
Le Cameroun à l’instar des autres pays d’Afrique Sub-saharienne présente une économie structurellement dominée par le secteur primaire qui emploie près de 56 pour cent de sa population active.
Avec une population de plus en plus jeune et une économie au ralenti qui n’offre pas assez de débouchés, le problème de l’insertion professionnelle constitue la préoccupation permanente du Gouvernement. Selon les
estimations officielles, près de 3.000.000 de jeunes étaient en situation d’emploi précaire avec près d’un million de jeunes en situation de chômage et deux autres millions en situation de sous-emploi
10
avant la crise. La troisième enquête camerounaise menée auprès des ménages a en outre révélé que le taux de
chômage des jeunes bien qu’inférieur à 10 pour cent au plan national 10 à 29 ans était néanmoins très important dans les zones urbaines telles que Douala 20 pour cent et Yaoundé 21 pour cent.
L’économie informelle offrait par conséquent le plus d’opportunités en termes d’emplois. En 2009, l’emploi informel représentait 8 pour cent de l’emploi total, un recul par rapport à 2005 où cette part
atteignait 9,6 pour cent. Par ailleurs, l’emploi formel dans le secteur privé représente que 4,2 de l’emploi
10
http:www.journalducameroun.comarticle.php?aid=642, http:www.journalducameroun.comarticle.php?aid=813
Figure 3. Répartition des actifs occupés par secteur en fonction du lieu de résidence et du sexe en pourcentage.
Source : DSCE 2009 20
40 60
80
Public Privé Formel Informel
agricole Informel
non-agricole
National Urbain
Rural
10 20
30 40
50 60
70
Public Privé Formel Informel
agricole Informel
non-agricole
National Homme
Femme
36
total en 2009, alors que ce chiffre est de 3.8 pour le secteur public. La répartition en termes de sexe vient appuyer le constat d’inégalité entre les hommes et les femmes, qui trouvent plus d’emploi dans l’informel
95,9 pour cent d’entre elles occupent un emploi informel en 2009. En ce qui concerne le taux de chômage, il a continué de s’aggraver atteignant 11,9 pour cent en 2009 contre 8,2 pour cent en 2007. Le sous-emploi
était extrêmement répandu avant la crise : il avoisinerait 75,8 pour cent de l’emploi total, plus marqué en milieu rural 78,8 pour cent qu’en ville 57,4 pour cent en 2007.
Cette tendance est principalement la résultante de la diminution des effectifs de la Fonction Publique et des entreprises du secteur public et parapublic suite aux privatisations initiées par le Gouvernement
camerounais PAS etc., ainsi que les difficultés du secteur privé à maintenir un niveau d’activités suffisant pour conserver les emplois. Par exemple comme effet de la crise, les acteurs du secteur forestier ont été
contraints de licencier plus de 20 pour cent de leur personnel 3500 ouvriers, à mettre près 15 pour cent environ 1000 cadres et ouvriers en chômage technique et à réduire le temps de travail dans 3 entreprises
suite à l’annulation d’importantes commandes et à la baisse des cours en 2009. Ce chiffre atteindrait les 10 000 emplois perdus secteur formel et informel compris si aucune action n’était entreprise pour sauver la
filière. De même la filière coton qui contribue à lentretien de 430 000 emplois : 350 000 dans la culture de coton, environ 4 650 dans la transformation et près de 75 000 dans la confection, a été menacée par les effets
de la crise entraîné par la chute de cours et l’enchérissement des intrants durant l’année 2009.
La crise a donc plus touché les jeunes qui continuent de se contenter pour la plupart d’emplois informels, en général précaires en termes de rémunération, de sécurité et de couverture sociale.
2. La relance des projets structurants, la promotion de l’emploi et l’allégement fiscal