Prise en compte des risques

91 En matière de gestion des déchets, le mode de calcul forfaitaire des subventions aboutissait, du fait des rendements d’échelle, à verser aux agglomérations et intercommunales importantes, des montants parfois largement supérieurs aux frais réels identifiables dans les déclarations de créances introduites comme justificatifs source 31.

3.7 Principe de confiance

3.7.1 Présentation

L’application du principe de confiance n’a véritablement pris son essor que sous la législature actuelle. Le principe de confiance est une mesure phare du plan de simplification administrative et e-gouvernement 2010-2014, reprise, pour ce qui concerne les entreprises, dans le plan Marshall2.vert et le plan Action, Industrie. Il a fait l’objet d’une circulaire, adoptée le 20 juillet 2011 par le gouvernement wallon, dans laquelle il est défini comme suit : le principe de confiance supprime, pour les usagers externes ou internes aux services du gouvernement ou organismes d’intérêt public, l’exigence systématique de pièces probantes etou attestations et de contrôle a priori, et les remplace par une déclaration sur l’honneur et la possibilité d’un contrôle a posteriori du respect des exigences décrétales et réglementaires. La mise en œuvre du principe de confiance modifie donc en profondeur la manière dont l’administration assumera à l’avenir sa mission de contrôle. À cet égard, le plan Ensemble, Simplifions énonce que dans le cadre d’une application pertinente du principe de confiance, il faut « repenser le contrôle et lui donner plus de moyens ». Le principe de confiance ne peut être appliqué que moyennant le respect de certaines conditions. Indépendamment de la réduction des charges administratives qu’il autorise, il doit permettre d’améliorer la maîtrise des risques sous-jacents au processus de contrôle examiné simplifié et ce, à un coût équivalent ou moindre. Au surplus, comme rappelé dans la circulaire précitée, le principe de confiance ne déroge pas à l’article 55 des LCCE, à savoir que « tout allocataire d’une subvention doit justifier de l’utilisation des sommes reçues, à moins que la loi ne l’en dispense ». La substitution d’une déclaration sur l’honneur à l’obligation de transmettre des pièces ex ante ne peut dès lors être opérée qu’après la modification d’une série de dispositions réglementaires s’appliquant aux dispositifs concernés. La circulaire prévoit qu’avant toute suppression effective de pièces, les dispositifs administratifs sélectionnés demande d’agrément, de subvention, etc. soient soumis à une évaluation préalable. La circulaire propose donc une analyse de l’opportunité d’appliquer le principe de confiance, des risques inhérents à sa mise en œuvre, ainsi qu’une étude de faisabilité en termes de disponibilité des ressources nécessaires à la mise en place d’un contrôle a posteriori. La Cour des comptes a examiné si l’évaluation prévue par la circulaire permet de s’assurer que les conditions énoncées ci-avant sont effectivement satisfaites.

3.7.2 Prise en compte des risques

La Cour des comptes constate que le principe de confiance est détaché du processus de gestion des risques de l’organisation. En effet, la circulaire relative au principe de confiance ne prévoit pas de se baser sur le niveau de maîtrise des risques pesant sur les activités concernées par l’introduction de ce principe. Par conséquent, il peut être appliqué en vertu de la circulaire, alors même que le niveau de couverture des risques existant est insuffisant. 92 En effet, plutôt que de s’appuyer sur les risques affectant les activités et les objectifs de l’organisation, la Cour des comptes relève que la circulaire tente d’évaluer si l’introduction du principe de confiance, et l’allégement du contrôle qu’il induit, feront peser, en tant que tels, de nouveaux risques sur les opérations administratives 159 . Les risques résultant de la mise en œuvre du principe de confiance sont mesurés à l’aune d’une série d’indicateurs portant à la fois sur le dispositif 160 et sur la pièce 161 dont la suppression est envisagée 162 . Ces indicateurs ne prennent pas en compte la maîtrise des opérations découlant des activités de contrôle actuellement mises en place au sein de l’administration, autrement dit l’efficacité des contrôles existants, de telle sorte que l’application du principe de confiance peut entraîner une dégradation de la maîtrise des risques. Ainsi, l’interprétation des indicateurs proposée par la circulaire peut conduire à des conclusions erronées quant aux risques que fait peser l’introduction du principe de confiance sur la maîtrise des activités, comme illustré par les exemples suivants.  Nombre de dossiers acceptés après avoir été traités La circulaire dispose que « dans le cadre d’un dispositif déjà en application, le pourcentage de dossiers acceptés donne une indication du risque d’alléger le contrôle à priori. En effet, plus ce taux est élevé, moins le risque est important. Si ce taux est de plus de 90 , le risque sera relativement limité. » Autrement dit, plus le pourcentage de dossiers acceptés est élevé, moins il serait risqué d’alléger le contrôle des pièces effectué ex ante et donc d’appliquer le principe de confiance. La Cour des comptes relève que la constatation d’un taux dacceptation élevé des dossiers traités pourrait tout aussi bien résulter dun contrôle inefficace. Cet indicateur ne peut dès lors être utilisé comme un estimateur du risque associé à la mise en œuvre du principe de confiance que si le contrôle opéré détecte efficacement les cas de fraudes, les erreurs, etc. Par conséquent, sans un examen approfondi de l’efficacité du contrôle et donc de la gestion des risques pesant sur les activités, le risque associé à la mise en œuvre du principe de confiance est impossible à déterminer.  Taux d’erreurs dans les dossiers La circulaire dispose qu’« une des problématiques que rencontre l’administration vient des erreurs réalisées par les usagers dans leurs relations avec le service public. Ces erreurs ne mettent pas en cause forcément la bonne volonté de l’usager mais elles sont un fait dont il faut tenir compte. Le contrôle a priori permet de les détecter en amont. Il est donc très utile à ce niveau. Plus le taux d’erreur sera élevé, plus il sera délicat de supprimer des contrôles a priori. » De nouveau, un faible taux d’erreur pourrait résulter d’un contrôle inefficace. Le taux derreurs dans les dossiers ne constitue donc un indicateur fiable de la confiance à accorder aux bénéficiaires que si le contrôle opéré permet de les détecter efficacement. 159 La circulaire vise principalement le processus générique « allouer ». Comme l’indique le texte de la circulaire, le transfert d’argent vers l’usager « fait encourir à l’administration une série de risques qui lui sont propres en termes de fraude et de non recouvrement par exemple ». 160 Nombre de dossiers acceptés après avoir été traités, état de l’environnement de contrôle existant, importance du montant alloué, récupération de montants versés. 161 Complexité de l’information prouvée et demandée par la pièce, taux d’erreur dans les dossiers actuels, impact sur la qualité du contrôle du remplacement de la pièce par un contrôle a posteriori. 162 D’autres indicateurs sont redondants ou ne s’adressent qu’à une composante du risque, soit la probabilité de survenance d’un événement, soit son impact. 93 Sans évaluation du contrôle, le risque d’application du principe de confiance n’est pas correctement estimé.  Exhaustivité du contrôle des pièces La circulaire stipule qu’« il faut aussi se poser la question de la qualité du contrôle réalisé dans le dispositif actuel. Il se peut que les pièces soient demandées mais que peu voire qu’aucun contrôle n’y soit appliqué. Dans ce cadre, la suppression de la pièce ne changera en rien la qualité des contrôles. » La Cour constate que le raisonnement tenu est contraire aux normes de contrôle interne. En effet, à défaut de contrôle des pièces, il convient de déterminer si l’application des activités de contrôle prévues par la réglementation permettrait de maîtriser efficacement les risques existants et, si tel n’est pas le cas, de revoir les modalités du contrôle, plutôt que de préconiser la suppression de la demande des pièces lorsqu’elles ne sont pas examinées. La Cour des comptes constate également que le risque d’une application inappropriée du principe de confiance est accru par l’introduction d’un biais en faveur de la suppression des pièces. Ainsi, en cas d’absence de contrôle, la circulaire recommande de supprimer les pièces, sans autres vérifications et sans s’interroger sur la pertinence d’un éventuel contrôle; si, par contre, les pièces font l’objet d’un contrôle approfondi, il est imposé d’en démontrer l’utilité. La Cour souligne au surplus que la démarche du principe de confiance n’a pas été intégrée à celle visant à définir les processus génériques du service public de Wallonie entamée dans le cadre du plan 2005-2009 de simplification administrative, e-gouvernement et lisibilité 163 . En effet, le développement du principe de confiance ne repose pas sur les processus génériques auquel il se rattache naturellement, à savoir le processus générique « contrôler » pour ce qui concerne sa nature même et les processus génériques « allouer », « autoriser » et « acheter », qui en constituent le principal champ d’application. Les processus génériques n’ont, par ailleurs, pas été actualisés au regard des développements relatifs au principe de confiance. Concernant le régime de sanctions qui devrait découler de la circulaire, la Cour des comptes constate qu’elle se contente d’énoncer qu’« une déclaration sur l’honneur erronée ou une fausse déclaration entraîne l’application des diverses sanctions et mesures prévues par les décrets et arrêtés applicables à la matière concernée ». Or, le Conseil d’État avait fait remarquer, dans l’avis 164 rendu sur l’avant-projet de décret portant sur la mise en œuvre du principe de confiance 165 , que le régime de sanctions prévu par la réglementation en vigueur en cas de déclarations sur l’honneur fausses ou erronées n’était, en l’état, pas admissible 166 . Il convenait également, selon le Conseil d’État, « de vérifier si les sanctions actuellement prévues sont bien adéquates et proportionnées à la diversité des comportements concernés, des 163 La description des processus génériques du SPW a été réalisée sur la base du plan d’action simplification administrative, e-gouvernement et lisibilité 2005-2009. Il visait notamment à fournir une méthode pour des procédures plus simples, dont un des résultats attendus était l’élaboration de manuels et de procédures types génériques. La description des processus génériques a été finalisée en décembre 2008. 164 Avis 49.5732 du 16 mai 2011. 165 Les modalités de mise en œuvre du principe de confiance ont été définies dans deux avant-projets de décrets. Toutefois, le Conseil d’État a estimé qu’il n’était pas nécessaire d’adopter un décret. Le texte a donc pris la forme d’une circulaire. 166 Selon le Conseil d’État, « on ne saurait en effet exclure que le système de sanctions figurant dans les réglementations actuellement en vigueur ne soit pas adapté à celui de la déclaration sur l’honneur, par exemple parce que ce dernier système ne serait pas prévu dans lesdites réglementations ou ne le serait que de manière marginale et que les textes relatifs aux sanctions seraient rédigés de manière à ne pas les inclure dans leur champ d’application ». 94 plus véniels comme une distraction ou une erreur de détail aux plus graves comme une tromperie intentionnelle ».

3.7.3 Modalités du contrôle