Note de synthèse Antécédents

61 L’administration a analysé les demandes d’aide correspondantes et élaboré, pour chacune, une note de synthèse 106 . Elle a ensuite présenté ces notes au collège visé par l’article 57 de l’arrêté du gouvernement wallon du 18 septembre 2008. Après examen, le collège a émis des avis favorables 107 ; il n’a cependant rédigé aucun procès-verbal, ni motivé ses décisions. Les avis de ce collège ne constituent pas des actes créateurs de droits et ne sont donc pas intrinsèquement soumis à l’obligation de motivation formelle fixée par la loi du 29 juillet 1991 précitée. Il en est de même des notes de synthèse élaborées par l’administration et présentées au collège, qui figurent au dossier administratif de la direction des projets de recherche. Par contre, les arrêtés ministériels octroyant les aides subvention dans le premier cas, avance récupérable dans le second sont des actes soumis à la loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs. Or, il n’est fait aucune mention ni des avis du collège ni des notes de synthèse dans la motivation des arrêtés. Dès lors, comme pour les PIT, l’absence de motivation formelle adéquate de ces décisions ne contribue pas à leur transparence et ne permet pas d’assurer qu’elles résultent d’une analyse cohérente et impartiale garantissant l’égalité de traitement des bénéficiaires.

1.3 Dossier spécifique

Un dossier particulier cumule plusieurs irrégularités. Une avance récupérable d’un montant de 2.218.800 euros a été accordée à une société par arrêté ministériel du 31 août 2011. Cette aide correspond à 60 du budget d’un projet de recherche, qui se chiffre au total à 3.698.000 euros. Elle concerne la phase III du projet. En 2008 et 2009, la Région avait accordé au bénéficiaire des avances récupérables pour les phases I et II à concurrence, respectivement, de 1.435.000 et 2.172.000 euros conventions 5729 et 6084 Le projet de recherche est défini comme suit à l’article 20 de la convention n° 6529 du 31 août 2011 : « Le projet X est basé sur le postulat quune vue en temps réel du risque dentreprise spécifiquement concentré sur la GRC gestion de la gouvernance, du risque et de la conformité aux directives légales exige une plate-forme de contrôle ouverte et automatisée, capable :  dévaluer les risques dentreprise dans des domaines multiples par un balayage continu de flux de données informatiques et métiers ;  de mettre en œuvre des points de contrôle sous la forme dindicateurs de risque, de performance, et de conformité aux points critiques de lentreprise :  démettre des alertes en temps réel sur tout incident ou écart observé par rapport aux politiques de gestion de la GRC de lentreprise. »

1.3.1 Note de synthèse

Avant la signature de la convention, le dossier a été présenté, le 25 mars 2011, au collège de sélection interne, qui a rendu un avis favorable à la condition de s’engager à reporter aux fonds propres les bénéfices réalisés en 2010 et pendant la durée du projet. 106 À cette note de synthèse est joint le résultat de l’examen réalisé par la direction de l’analyse financière. 107 Le cas échéant avec condition. 62 La note de synthèse figurant dans le dossier comporte les anomalies suivantes :  au point 4 aspect commercial - marché : la note indique qu’il « est utile de remarquer que le logiciel résultant de la phase I a généré en 2010 un chiffre d’affaires de 1,2 millions d’euros ». Cette information a été rectifiée par la note de la direction de l’analyse financière, qui mentionne 0,86 million d’euros comme chiffre d’affaires de l’entreprise, en 2010 ;  au point 5 : les critères d’évaluation correspondent adéquatement à ceux prévus dans la réglementation mais ne sont pas utilisés judicieusement ;  au point 5.5 : la note stipule qu’une autre société se porte garante de l’entreprise. Toutefois, aucune mention de cette garantie n’apparaît ni dans la convention ni dans le dossier 108 . À l’analyse des critères d’évaluation prévus par la réglementation, la Cour des comptes fait observer que la qualité et la pertinence du projet ne sont pas évaluées ; en outre, concernant la valorisation de l’innovation, le degré de risque et l’effet incitatif, la note de synthèse ne répond pas au prescrit des articles 40, 43 et 44 de l’arrêté du gouvernement wallon du 8 septembre 2008 relatif au soutien de la recherche, du développement et de l’innovation en Wallonie. 1.3.2 Convention 1.3.2.1 Sous-traitances Dans la convention du 31 août 2011 liant l’entreprise à la Région, le point 23.1 « sous-traitance faisant l’objet d’une convention » précise que « à la date de la signature de la convention, aucune sous-traitance de la sorte n’est prévue », tandis que le point 23.2 « sous-traitance ne faisant pas l’objet d’une convention » prévoit une sous-traitance à une société tunisienne pour un montant de 1.144.856 euros. À l’article 22, le tableau du personnel présenté correspond à celui de l’article 24 consacré au budget de la recherche. Dans l’article 24, une note de bas de page indique que six salaires sont facturés via une société de management. Il ne s’agit donc pas de salaires afférents à des membres du personnel de la société ; dans les faits, il y a donc sous-traitance. Ce constat est confirmé par l’avenant n° 1 à la convention, signé le 13 janvier 2012, qui stipule que les six montants précités correspondent à des sous-traitances en Belgique pour un montant total de 1.020.570 euros. Les termes de la convention initiale ne correspondent donc pas à la réalité puisque toutes les sous-traitances n’y figurent pas à ce titre. Les deux premières conventions de 2008 et 2009 comportaient la même irrégularité. Elles ne faisaient état que de deux sous-traitances, l’une en Tunisie et l’autre au Brésil. Pourtant, les articles afférents au budget de la recherche109 mentionnaient, comme en 2011, que six salaires étaient facturés via une société de management. À l’époque, aucun avenant n’a 108 Selon l’administration, «Cette garantie n’est pas reportée dans la convention car l’analyse financière n’a pas retenu cette garantie. En collège, il a été décidé que seule la garantie demandée par l’analyse financière était retenue. A savoir, affectation du bénéfice des exercices 2010 et 2011 aux Fonds Propres. Le document de présentation des dossiers du Collège du 2132013 mentionne la clause correcte». 109 Article 24 de la convention de 2008 et article 27 de la convention de 2009. 63 cependant corrigé les termes des conventions initiales qui ne correspondaient pas non plus à la réalité.

1.3.2.2 Réserves

L’avenant n° 1 du 13 janvier 2012 fait apparaître, à l‘article 24, qu’un montant de 487.964 euros sera affecté à des réserves. Une telle dépense n’est pas admissible au sens de l’article 22 du décret du 8 juillet 2008.

1.3.2.3 Frais de missions

Le budget de la recherche comporte des frais de missions pour un total de 31.500 euros destiné au coaching des équipes offshore alors que les activités offshore de la recherche sont déjà prévues en tant que sous-traitance pour un montant de 1.144.856 euros. Elles doivent être réalisées par le sous-traitant tunisien. Cette situation implique que plus de 30 de la recherche financée sera réalisée en dehors de l’Union européenne, ce qui rend impossible le contrôle du prescrit de l’article 22 du décret du 3 juillet 2008 précité. D’autre part, une sous-traitance n’a pas à être majorée par des frais de coaching : le sous- traitant a les compétences techniques requises, ou il ne les a pas. Si le choix du demandeur s’est porté sur une société tunisienne – dont on ne sait rien au demeurant – c’est à lui d’assumer les frais découlant de l’éloignement géographique. Au reste, la Cour s’interroge sur les raisons qui ont guidé ce choix alors que la transaction doit s’opérer « dans les conditions normales de la concurrence ».

1.3.2.4 Frais généraux

L’avis favorable de la note de synthèse aboutit, dans la convention, à des frais généraux acceptés pour un montant de 232.104 euros. Conformément à l’article 8.6.1 de la convention 110 , ils auraient dû être limités à 126.897 euros 111 .

1.3.3 Antécédents

Comme évoqué ci-avant, la société bénéficiaire a reçu, en 2008, une première avance récupérable de 1.435.000 euros. La convention établie à cette occasion n° 5729 et l’arrêté ministériel d’octroi n’indiquent pas qu’il s’agit d’une phase préparatoire d’un projet plus global. L’objet de la recherche est identique à celui de la convention n° 6529 du 31 août 2011 phase III. Par ailleurs la 110 « Les dépenses admissibles correspondant aux frais généraux sont calculées de manière forfaitaire. Elles s’élèvent à 10 de la somme : - des dépenses admissibles de personnel ; - des dépenses admissibles de fonctionnement, hors frais généraux, frais de sous-traitance et frais d’équipement. » 111 Déduction faite des sous-traitances et des frais de coaching offshore. 64 convention n° 5729 prévoit en son article 29.3.3 que les redevances d’exploitation remboursement de l’avance récupérable seront dues à partir de l’année 2011 aucun chiffre d’affaires prévisionnel n’est mentionné. Une seconde avance récupérable de 2.172.000 euros a été accordée à la société en 2009 pour la poursuite du projet convention n° 6084. L’arrêté ministériel, non daté, octroyant l’avance stipule cette fois qu’il s’agit de la phase II du projet, mais il n’indique en rien qu’une phase ultérieure sera nécessaire à l’achèvement de la recherche. Cette convention précise que les remboursements de l’avance reçue commenceront en 2012 ; le chiffre d’affaires prévisionnel est de 21.350.000 euros. Dans la troisième convention n° 6529 examinée, le chiffre d’affaire prévisionnel est établi à 32.600.000 euros. Cependant, il est stipulé que les remboursements de l’avance ne commenceront qu’en 2013. Lors de la rédaction du présent article, l’administration a indiqué que la société avait pris contact avec le gestionnaire technique pour introduire une nouvelle demande d’avance récupérable. En résumé, les aides octroyées à la société depuis 2008 atteignent aujourd’hui un total de 5,8 millions d’euros, mais aucun remboursement n’a été réclamé. Lors de l’élaboration de la dernière convention, l’administration a en effet accepté de considérer que le projet n’aboutirait commercialement qu’en 2013 et que les remboursements commenceraient au plus tôt cette même année. Le chiffre d’affaires prévisionnel, prévu pour 2012 dans la deuxième convention, a été reporté en 2013 dans la troisième. L’administration considère qu’elle ne peut pas abandonner le projet après avoir accordé des aides si importantes. Dans l’état actuel du dossier, la récupération de l’avance octroyée paraît largement incertaine. En effet, à la clôture de l’exercice 2011, la société bénéficiaire présentait des fonds propres négatifs et tombait sous l’application des articles 332 et 333 du code des sociétés réduction de l’actif net par suite de pertes. À la clôture de l’exercice 2012, la situation de l’entreprise s’était améliorée mais elle présentait toujours une perte d’exploitation.

1.4 Conclusions et recommandations

Au terme du contrôle de légalité mené sur un échantillon de treize dossiers sélectionnés de manière aléatoire parmi les ordonnances de 2011 imputées aux programmes 31 et 32 de la division organique 18, la Cour des comptes a observé que cinq arrêtés du gouvernement wallon accordant des aides à des partenariats d’innovation technologique et deux arrêtés accordant des aides à des entreprises individuelles ne satisfont pas aux exigences de la loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs. L’absence de motivation formelle adéquate de ces décisions ne permet pas d’assurer qu’elles résultent d’une analyse cohérente et impartiale garantissant l’égalité de traitement des bénéficiaires. Concernant les projets d’innovation technologique, les arrêtés ministériels faisant référence à lévaluation du programme de recherche « par le jury constitué à cet effet » ne permettent pas d’expliquer la décision prise, ni d’apprécier dans quelle mesure les avis et les réserves éventuelles du jury sont traduits adéquatement par le gouvernement. Quant aux arrêtés accordant des aides à des entreprises individuelles, ils reposent sur l’avis du collège prévu par l’article 57 de l’arrêté du gouvernement wallon du 18 septembre 2008 et sur une note de synthèse élaborée par l’administration. Cependant ils ne font aucune